jeudi 25 avril 2024

ZINNIA

Les fleurs s'amusent
de leur propre allégresse,
le souffle doux de la Zinnia
me convie au jeu et aux amours.

Le soleil dans la poitrine,
la forêt, un autel d'éternité.
Quand volette la liberté,
même la nuit s'éclaire.

Je lance un cri de joie
et les montagnes répondent
solennelles, imposantes.
L'écho rend le chant plus plaisant.  

Inépuisable la nature
répand son elixir
et l'enfant qui veut sortir
prend plaisir à la scène. 

Glòria Bassols i Compte, traduit du catalan
par Michel Bourret Guasteví 

LE VENT RUGIT

Le vent rugit avec force
En ce petit matin qui jamais ne s'arrête
Le vent solitaire lèche le silence brisé
tandis que le dialogue éclate contre le volet
Ave une rage inconnue, difficile à comprendre
La respiration s'entremêle avec la hâte
Du courant d'air qui me jette
Par terre des lectures d'autres hivers
celles d'hier et celles qu'il me reste
L'intense fureur d'Éole me ravit à la nuit
Spectres de phrases insensées

Murmurées au creux des lèvres me parlent
De passions maladives écrites comme
Dictées par quelqu'un derrière l'écran
De notre petit cerveau externe
Les souvenirs analogiques

Recouvrent les souvenirs digitaux
Tout à un pas du reset
Tout virtuellement masqué
Tout comme une mire ancienne

Rosa Miró Pons, traduit du valencien
par Michel Bourret Guasteví

EL VENT RUGEIX

El vent rugeix amb força 
Aquesta matinada que mai no acaba
El vent llepa en solitud el silenci trencat
Mentre el diàleg esclata contra la persiana
Amb una ràbia desconeguda, difícil d'entendre

La respiració s'entremescla amb la pressa
Del corrent d'aire que em llança 
A terra lectures d'altres hiverns
Les d'ahir i les pendents
La intensa fura d' Eolo m'arrapa la nit

Espectres de frases sense sentit
Murmurades a cau de llavis em parlen
De passions malaltisses escrites com
Dictades per quelcom darrere la pantalla
Del nostre petit cervell extern

Els records analògics 
Solapen les records digitals
Tot a un pas del
reset
Tot virtualment emmascarat
Tot com una carta d'ajust antic

Com a senyal de fe

Deixaré el til·ler,
majestuós i serè
i m'encaminaré
cap a l'embruix del dia.

Uns camps de blat creixent
al límit de la vila,
pentinats pel gregal
que porto a dintre meu.

Deixaré el til·ler,
guardant a la butxaca
les seves flors groguenques
com a senyal de fe. 



mercredi 24 avril 2024

Un món en creació

I si nasqués la terra
d'una efusió de l'aigua.
Aquarel·la embogida
en mans d'un pintor llest.

Al cor dels gargots vius,
un sol de mil colors,
com el vermell d'un ou
ferrat al mig de l'illa.

No hi hauria llevant,
ni ponent cap al mar.
Espectadors seríem
d'un món en creació.














© Francesc Garcia Arbós

Textes durs

À C., R. et J.

Il est des textes durs.
La feuille d'un carnet,
arrachée, griffonnée,
en lettres capitales.

Le cri sourd d'un enfant
qui ne veut pas partir
du foyer qui l'accueille
vers d'autres bras aimants.

Les larmes de son bleu
ont crevé le papier
de mille lames vives
qui entaillent ses bras.

Il est des textes durs,
quand un petit garçon,
arraché à son monde,
pénètre en poésie. 

SIRÈNE terrestre

Robuste,
l'écorce d'une absence
quand la solitude
t'habite dans la tellurie d'un chant

pour découvrir
une osseuse incubation,
sincère de vent,
Sirène extatique
et échevelée.

En fuyant de la mer
du néant,
entourée d'autre marée
par le territoire
de tes gains.

Glòria Bassols i Compte, traduit du catalan
par Michel Bourret Guasteví 

Últim picnic al Xalió

Llum intensa del sol
que acompanya el dinar
dels mainatges del nord
retrobant la seva hora.

Com un rellotge fosc
l'ombra envaeix el prat,
tancant les carmanyoles,
amb un bes de tomàquet.

És l'hora de partir,
de tornar a la vila.
De creuar les Alberes
cap a la Fidelíssima.



PÉTALES DE GIVRE

Mes mots fondent en morceaux
tels des souvenirs scellés sur les pierres,
et un vol de pensées
s'éloigne, dans le ciel, sur des fragments
opaques de cendres noires.
Quand je me promène dans les années de l'incertitude,
je suis abrité par les ombres du feu, 
comme des escadres ciselées
luttant contre le vent.
De la réalité nouvelle,
je me libère de la peur
qui enflamme le cri final
et je m'enfonce dans le bois,
parfumé de pétales de givre,
à la conquête d'un silence
qui me promette un destin d'infarctus.

Lluís Bosch, traduit du catalan
par Michel Bourret Guasteví

L'heure du couchant

Le sable veut dormir,
foulé par mille pieds
de marcheurs d'occident
allant vers l'eau lustrale.

C'est l'heure du couchant,
la paix des éléments,
qui cherchent dans le feu
la paix du lendemain.

Les âmes s'y unissent
et le sel s'y retient.
Mémoire du ponent
qui rêve de la terre.













© Brigitte Prédeval

Poetes a banda i banda de l'Albera

   Que són de blaves les Alberes
                  Gumersind Gomila

Comparteixen els mots,
la veu i la passió.

Els seus versos respiren
el vent de tramuntana,

la blancor de les veles,
la terra dels camins.

S'han obert a les llengües
que parlen els veïns,

fugint de capitals
i de miratges vans.

Venen de les comarques
que toquen la muntanya

i tenen per talaies
antenes del Neulós.











© Lionel Itié





Veu de poesia

Preguntes dels infants
són veu de poesia.

Quan parla la poeta,
n'escolten el batec.

I veuen que set mots
en poden dir milers,

quan segueixen el ritme
que sorgeix del paper.

mardi 23 avril 2024

PLACIDITÉ

Les heures de la mer peignent les tamaris sans trêve ni repos.
À côté de l'eau le voyage est soutenu et aimable.
Rien à dire.
La mer se transforme en argent
avec des poissons brillants
qui se cherchent et se cachent.
les vagues sont douces.
Le sel accompagne la vie dans une eau sans port.

Baltasar Fonts, traduit du catalan
par Michel Bourret Guasteví 

Espigolant

Espigolant espigues
espigolant espígol.
Foscor de la lavanda
i claror del blat sec.

Tiges per fer cistells
i granets del jardí.
Uns regals amatents
del dia de Sant Jordi.

Espigolant espigues,
espigolant espígol.
Vigor del nostre idioma
i tristor dels callats.




Brúixola de Sant Jordi

Brúixola de Sant Jordi,
Brúixola de paper.
En compte dels vells punts,
els parlars catalans.

Al centre del país
qui ha sigut ha set.
I l'espígol bonic
s'hi diu el barballó.

Els porquets són garrins
i la votura cotxe.
Les trumfes són patates
mes tothom català.














© Associació Arrels - Catalunya Nord

LAVANDE

Il y avait des nuages lilas
dans des rêves
de nuits tranquilles.

Tu étais toute belle,
parfait
rejet de sucre.

Ce sont des filigranes,
Lavande, 
tes arômes tardifs.

Avec toi :
le jardin se fait ardent et infini
et tu ne sais rien de son charme.
Tu ne fais
qu'exhaler des présents d'amourettes
avec des teintes de jolies fêtes.

Glòria Bassols, traduit du catalan
par Michel Bourret Guasteví



AUX VIEUX MINEURS DE SURROCA

Ils minaient le corps,
ils minaient la mine.

À l'intérieur du puits
ils tranchaient la vie,
piquant, tous avec tous,
ils la rendaient plus triste.

Château au trésor,
wagonnet haut,
rails de douleur 
d'hommes qui n'en parlent pas. 

Toujours le même son
loin des rires
des enfants agités
qui attendent leur père.

Ils minaient le corps,
ils minaient la mine
pour cette fièvre d'or
leur couronne d'épines.

Et l'épouse tremblante
cuira sur le feu ultime
jusqu'au recommencement
du dernier de leurs tours.

Baltasar Fonts, traduit du catalan
par Michel Bourret Guasteví 

Una bosseta blava

Una bosseta blava.
Barballó dels camins.
Puntetes de lavanda
espigolant la mà.

La xarxa és delicada
que els aplega a milers.
El perfum és d'un déu
o bé d'una deessa.

Una bosseta blava,
regalet de la Glòria.
Una amistat serena
per fer camí plegats. 



Rosa del meu abril

Només vull una rosa,
la més lletja de totes,
Aquesta que ningú
vol portar a la mà.

Una rosa ferida,
de pètals estripats,
amb espines agudes
per ferir al seu torn.

No me la compraré.
Només la miraré.
Li dedicaré versos
i me la guardaré.

Saint Georges est las

Le cavalier est las
et ses combats sont loin,
il a laissé son heaume,
sa lance et son épée.

Son cheval, délié,
mâchonne du foin frais.
Saint Georges ne veut plus 
que des plaisirs légers.

Désirer une rose,
la sentir sous son nez,
et vivre son amour,
sans avoir à séduire. 

Les gestes murmurés

Les gestes murmurés 
franchissent la distance
que le sommeil impose
au sein des terres sombres.

Au creux de ton oreille,
ma main sait déposer
ses frôlements de doigts 
qui dessinent ton cou.

Naissance des cheveux...
Puis vient le long du dos,
la clarté de sa peau
que jamais tu ne vis.

Après les doigts, les lèvres
qui susurrent des mots.
Des gestes en voyelles
et des consonnes ivres.

Le plaisir te saisit,
venu des profondeurs
d'un temps immémorial
qui n'a cessé de battre.

La paix enfin revient,
tu reviens au sommeil.
En toi, se sont gravés
les gestes murmurés.

Mots et paroles

J'imagine tes nuits
de silence profond.
La paix des heures mortes
où tu te sens si bien,

sans revenir jamais
au monde des paroles,
que le jour a brassées
comme un vieux chiffonnier.

En toi les mots s'ordonnent,
acier chirurgical.
sans être prononcés
mais avec plus de force.

Ce sont des mots d'amour
et de concorde pleine.
Un sourire à la vie,
couché sur le papier.

Dans ton sommeil de reine,
règne la liberté
de refaire le monde
sans en changer jamais 

lundi 22 avril 2024

Douceur

Il est une douceur
que je ne sais décrire.
La douceur de ta peau
qui rencontre mes doigts.

C'est juste une pincée,
un doux frémissement
qui sait fermer les yeux
et ouvrir tous les sens.

Il est une chaleur
qui envahit sans feu,
laissant les mots choisis,
au fond de nos tiroirs. 

RÊVES

J'écris allongé sur le lit
couvert de pierres jusqu'au cou.
Des pierres arrondies, grandes, moyennes, petites,
les bras étendus, les mains agrippées au corps.
Le corps calme.
Il semble qu'il n'y ait que mes yeux à pouvoir bouger,
mais il n'est pas nécessaire qu'ils le fassent.
Je sens le poids
les yeux fixes sur le souvenir de toi.
Le paysage de la mer emplit tout mon regard,
l'horizon bleu, la mer bleue, et le ciel clair,
comme une fenêtre de lumière dans une chambre obscure.
Le lit d'ombres sèche,amères,
définies par les pierres arrondies par le poides de l'eau.
Couleur de roche nue,
couleur de cendre au soleil de midi.
L'image lumineuse entre à l'intérieur de mes yeux
et couvre de couleur le souvenir de toi.
Une sérénité fraîche, d'humidité légère
me caressant le corps.

Sentant le son du bleu à l'infini.

Jordi Tolosa, traduit du catalan
par Michel Bourret Guasteví 

LE SILENCE DES HERBES

Mais tu es toujours là, pour éveiller
la vision de ce qui est plus haut et me survole.
                                                  Emily Brontë

Abandonné à son destin,
il parcourait le mystère
que la lumière
condensait dans un rayon
éclatant qui émergeait sous les nuages.
Estompé par le soleil, il polissait des roses blanches
sous un ciel éclaboussé
de toiles d'huile poudrées d'orange.
En pleine solitude, il écoutait le battement
du monde qui affûtait les heures,
et accroché à la racine de ces terres,
il contemplait l'air indécis
qui tremblait entre les feuilles.
Encore aujourd'hui, la voix de son souvenir
survole le silence des herbes.

Lluís Bosch, traduit du catalan
par Michel Bourret Guasteví

LES FEUILLES DU CHEMIN

Recouvert par un ciel de poussière et de cendre,
je parcours les feuilles enterrées
que j'ai laissées contre les bords du chemin,
et à chaque pas j'entre de plus en plus dans le tréfonds
de moi-même, je m'approche de l'incertitude
qui me condamne au silence et à l'oubli.
Je vis encore avec le poids compté des jours,
avec l'angoisse que fait naître la solitude,
tandis que les années délaissées m'emportent
dans des destins prometteurs de rêves creux.
Le temps proclame que tout ne sera que
la part de moi-même que je n'ai pas pu comprendre.
Tandis que j'avance sur l'épaisseur tassée
des feuilles mortes détachées des arbres,
je sens la peur que génère la finitude.

Lluís Bosch, traduit du catalan
par Michel Bourret Guasteví

Un viatge en petit

La veu, la veu i els dits.
Les paraules amigues,
amb els sons de l'Ucraïna.
Poemes de la Glòria.

S'han envolat olors
i blaves aquarel·les.
El timbre de la veu
és una vela lleu.

L'Olga juga amb els segles,
amb les barques i els llocs.
Atemporalitat fecunda,
del contrabaix a l'arpa.

És un viatge en petit
per les llengües comunes.
De l'agut i el greu,
els hiats i sinalefes.

Amb ritme de veler,
ens acompanya l'Olga,
per l'ample Mar d'Amunt
i l'Empordà fecund. 














© Ramon Aguilar

LE MÉTRO


Empreintes
Impressions d'un passé sur les mêmes lieux
Marques du temps
Traces de polymère, de vernis, de plexiglas, de cuir
Vestiges récents de chaussure usée
Espadrilles nomades
Sandales poussiéreuses
Tennis bohémiennes, trésors !
Têtues et obstinées
les chaussures nous poussent vers les wagons
et pleines de désirs nous conduisent, cabochardes
Entre des veines parallèles, artifices et voies mortes

II
Cothurnes en file
Quais fatigués de la monotone routine
Fourgons somnambules pleins de pieds anesthésiés
Comme des âmes effrayées prises au piège de l'inertie
Véloce
Les entassant dans des tunnels
Fuyant les dénivellements
Ennuyeuse mesure
Tchou-tchou
Tchou-tchou
Tchou-tchou

III
Chaussures neuves
Empreintes futures pour les vieilles voies ferrées
Des traits qui deviendront de la poussières de voies urbaines souterraines
Galeries du destin
Qui sait ?
Sentiers de vie
Traces de pas effacées par des silences
Et cette odeur de goudron

IV
Locomotives, fourgons, convois
Escaliers mécaniques
Tunnels
Rats et grillons
Obscurités soudain illuminées
Oreilles surprises par des ténors anonymes
Sopranos ignorées
Guitares et saxos
Orchestre de chambre sans concertino
(groupes interchangeables)
Hasard d'une connaissance qui nous salue
Solitudes saisissantes
Yeux d'enfant qui demandent à manger
D'un s'il vous plaît insensé
Croches, doubles croches
Clés de fa sans sol

V
Chaussures
Chaussures muettes, rythmiques ou lentes
Bottines usées supportant les genoux
Cors de pieds vieillis par les cahots de la vie
Hanches de vieilles nourries d'ostéoporose
Râleuses cannes de vieux méfiants
Chaussures sur les quais
et cette odeur de goudron

Rosa Miró, traduit du valencien
par Michel Bourret Guasteví

Penèlopes guerreres

Une belle Minerve est l'enfant de ma tête.
Une étoile de sang me couronne à jamais.
Apollinaire
Les dones ucraïneses,
teixint i reteixint.
Penèlopes guerreres
segons les estacions.

Xarxes blanques d'hivern,
xarxes verdes d'estiu,
per protegir soldats
en contra dels obusos.

Les dones ucraïneses
somnien en la pau,
un teler de blancor
per teixir paraments.

Entre dos tamarius

Entre dos tamarius,
els rínxols del teu cap
jugant amb el ressol.

Un dinar de somriures
amb tomàquets cireres,
uns panets de formatges
i llenques de fuet.

Entre dos tamarius,
el teu esguard pillet
jugant amb els meus mots. 

Gloriosa paradeta

En un petit mercat,
a recer de l'església,
es venen unes flors
amb olis essencials.

Uns bastonets d'encens,
unes espelmes grogues
i d'altres gentileses
per embellir la casa.

Sota el tendal de tela,
portat per quatre rostres,
es conjuga la glòria
en futur anterior.

SOUFFLE D'HIVER

Quand tu revins, tu découvris les stigmates
de feu étendus sur la poussière des ans.
Le temps avait emporté l'éclat
secret de ces yeux d'après-midi enflammée.
Il ne nous fallut rien savoir de jadis,
de ces angoisses maigres d'où naissait
le silence indécis des paroles
qui faisaient fondre le souffle rougeoyant du ciel.
D'un seul geste le temps s'arrêta
sur l'image que quelqu'un avait emportée
de toi, et seul, je découvris cette part 
de moi perdue dans tes yeux d'hiver.

Lluís Bosch, traduit du catalan
par Michel Bourret Guasteví

TULIPES

Ils se ressemblent tant
l'Amour et la Mort,
il suffit de se rendre
dès leur arrivée.
Traverser le seuil 
de chaque énigmatique verger.

La fleur se livre
et nous nous livrons.
Un printemps
en touche un autre
que sépare le fil
d'un sommeil de glace.

Les tulipes se réveillent
de leur sommeil dans le lit.

Glòria Bassols i Compte, traduit du catalan
par Michel Bourret Guasteví 

Une jolie figure

À la mémoire de ma fille Florence

Il y a trente-six ans,
un jour comme aujourd'hui,
naissait une petite
avec des cheveux noirs.

Une jolie figure,
des yeux cherchant les ombres
et des lèvres buvant
le lait de sa maman.

Il y a trente-six ans
et tant de nuits sans elle.
Une jolie figure
qui voulait exister. 

Espelmes

Espelmes de cera,
espelmes de mel.
Espelmes que fonen
al cel dels esguards.

Espelmes rodones.
La lluna grogosa.
Un fil de cotó
i les mans de poeta.

Espelmes de tinta.
De tinta groguenca.
Paraules per escriure.
Paraules per donar.

Parole juste

Elle est parole juste.
La justesse des mots.
Les mots de la justice.

Un regard acéré,
syllabes détachées,
pour enseigner le monde.

Si l'écriture est vie,
elle sait la décrypter
et nous en régaler.



Mans

A la Glòria i en Lluís

Les mans de la poeta
amb les mans del poeta.
Les mans de l'escriptura
amb gestos del present.

La veu és manual.
El ciment del paleta.
Les mans saben escriure
i regalar el món.

Les mans dels meus amics,
amics en poesia,
homenatgen l'escrit
amb paraules d'amor.

L'home dels ocells

Al Ramon Aguilar

És l'home dels ocells,
és l'home de l'amor.
L'acompanyant callat
de la cantant de vida.

De la funda li treu
una bandura enorme,
delicada presència
del país violentat.

Al seu costat, la filma
sense mai dir un mot.
No hi ha protagonisme
sense ajudant fidel.

És l'home dels ocells,
és l'home de l'amor,
amb nom de comte bo
i cognom d'ocell rei.

dimanche 21 avril 2024

Barca plena de terra

Nuestras vidas son los ríos
que van a dar en la mar,
que es el morir.
                Jorge Manrique

Barca plena de terra,
sediments dels amors.
Les ganes i el desig,
tot al llarg de la vida.

Terra grassa dels camps
i sorra de ribera.
Arrels arrabassades
amb herbes dels camins.

Barca plena de goig,
de penes i de vida.
De cadascú la història
i de tots el camí.

Conscience des nuages

Le nuage est glacé,
qui semble de coton.
Brouillard à l'intérieur
de cristaux affutés.

Des lames dans l'attente
d'une averse soudaine.
La grêle ou bien la pluie,
le sort décidera.

Des larmes dans la pente,
détresse de l'instant.
Conscience des nuages
qui passent en grondant.

L'œil du nautile

C'est une chambre noire 
qui s'ouvre sur l'instant.
Un morceau de conscience
dans la nuit de la mer.

Ballet de tentacules
qui recherchent des proies,
pendant que l'œil figé
enregistre des ombres.

Des couleurs qui avancent,
le noir de l'œil glacé.
Contrastes qui se meuvent
au fond des profondeurs.

samedi 20 avril 2024

PARFUM DE LAURIER

Je contemple le vol incertain de gouttes de givre
qui voyagent dans les nuages défaits de l'horizon.
Invisibles au vent, elles traversent l'air épais
comme un cristal de glace, brillant et inaccessible.
Dans les couleurs de la pluie, les images écrites
résonnent jusqu'à toi dans un silence caché
qui s'accroche aux notes qu'accueille ta voix.
Alors, dépossédé du don de la parole,
je ne connais plus le parfum qui manquait au laurier,
et embrassant les feuilles qui pleuraient du ciel,
je me perds dans les souvenirs et j'ignore la distance
et le temps inconnu qui les a portées jusqu'ici.

Lluís Bosch, traduit du catalan
par Michel Bourret Guasteví

LA DANSE DU NAUTILE

Perdue dans le regard du temps. Marque
d'une océanique présence. Humble
spirale de la nostalgie terrestre.
L'eau se teint d'un évanouissement subtil.

Avec la tendresse d'un enfant dans son berceau
-Quelle main t'a-t-elle laissé, iridescent,
oscillant à la merci des eaux tout seul ?
Tu vis. Tu existes !, sans nulle lamentation.

En toi résonnent les vents étrangers,
car, la nuit venue, quelque écho réclame.
Dans la conque fermée à l'envers

surgit la divine proportion,
d'un abordable balancement qui tisse
de nacre la lointaine fluxion.

Glòria Bassols i Compte, traduit du catalan
par Michel Bourret Guasteví 

La danse du Nautile

En écho complice à un sonnet
de Glòria Bassols i Compte

La danse du nautile ne sort jamais des livres,
son papier est glacé qui fascine les yeux,
elle est un mouvement qui ressemble à un jeu,
et sans jamais bouger, voici qu'elle vous rend ivre.

Curieuse construction, bien compartimentée.
Au creux d'un escalier, un beau colimaçon.
Mais quel est ce démiurge, ou ce savant maçon
qui a su l'édifier avant de l'orienter.

Sa spirale est si belle que mes lèvres s'inclinent
et sur la page blanche, je dépose un baiser.
Je ferme alors les yeux, me voilà apaisé.

Mes larmes sont de joie, leur humeur est saline.
Le nautile est fécond qui sait réconforter
les amants d'absolu... sans les déconcerter.



 

Dans la pénombre aussi

Dans la pénombre aussi,
il est une lumière,
de frôlements de doigts
qui découvrent les pages.

L'écriture s'envole
il reste le papier,
son grain incomparable,
les pages à venir.

Le volume est un tout,
une voile légère,
l'image de ces draps
qui couvrent les amours.

A orillas del mar

A orillas del mar
se escriben poemas,
con huellas pasajeras
camino de la nada.

Camino de la nada,
por sendas de arena.
Se esfuman las huellas
cuando las bebe el mar.

En el sur de la isla,
la arena es de harina.
La nada es un todo
y no quiero salir.

Et s'il n'y avait que lui...

Et s'il n'y avait que lui,
    l'amour,
sur une île déserte,
    l'amour.

Dessus le sable fin,
    l'amour,
entre le vert et l'eau,
    l'amour.

Et s'il n'y avait que lui,
    l'amour,
à donner à autrui,
    l'amour. 

Al alimón

Com en Llorca i Neruda
torejant les paraules,
en Pere i la Cristina,
ambdós al alimón.

Parlen de poesia,
giren els fulls de vida,
amb paraules triades
per complaure als amics.

És un toreig de vida,
un regal de paper,
uns minuts sense música
mes amb timbre d'amor.



Pastís de xocolata

A la Coleta

Pastís de xocolata,
amarga i tan suau.
Uns quadrats de foscor
per endolcir la nit.

Un quadre en blanc i negre,
a la taula d'ahir,
per fer el cafetó,
abans de recitar.

Pastís de descoberta,
memòria dels dits.
L'ofrena de Coleta
als amics reunits.



Marges

A la Glòria Bassols,
amb agraïment

Deixar marges en blanc,
al costat dels poemes.
Uns marges infinits
per fer sorgir els mots.

El blanc és llibertat
del lector hipotètic,
sense cara ni rostre,
mes amb ploma segura.

Els versos són llavors,
unes pedres rodones,
per llançar passanelles
al mar de l'Empordà.



EN DESCENDANT AU LAC

Emporté par la rumeur constante de l'air,
je laissais filer le temps sous le calme
épais qui voilait l'horizon.
Au bord du lac,
mon image se réfléchissait à l'ombre
d'une cîme lointaine et inconnue,
enracinée dans la mémoire trompeuse.
Tandis que filait dans la vallée
le souffle frais du printemps,
il emportait l'automne innocent des pas
sur les verres joueurs de l'eau.
Plus jamais ne reviendra le reflet de la lumière
qui vit dans le ciel perdu de l'innocence.
Quand tu as crié mon nom,
les eaux s'éclaircissaient avec la lumière
que tu me rendis ce soir là. 

Lluís Bosch, traduit du catalan
par Michel Bourret Guasteví

Benevolència

A l'André Ròber,
amb agraïment...
...i admiració

Benevolència...
m'agrada la paraula
que pronuncio marquant
l'hiat amb un deix

d'accent italià.
Benevolènci...a, 
com ti voglio bene,
tímid circumloqui
per l'amor que ens emporta.

Benevolència,
agraïda mirada
des del final de la vida
cap als dies passats.

Un sopar entre amics,
al mig d'una vetllada.
Una nit de poetes
en una illa de terra.

Les taules eren blanques,
formant amfiteatre.
Dempeus se succeïen
les veus de dues llengües.

De dues... o fins a tres.
Amb el crioll pillet
del bon daron André
jugant amb les horetes.

Una nit de dissabte.
Una nit d'amistat.
Un ramat d'hores blanques,
benèvoles i justes. 



Mémoire de sel

À l'ombre du jardin,
la barque emplie de terre,
revenait à la terre,
en disjoignant son bois.

La peinture écaillée,
squelette écarquillé.
Le sel avait rongé
le bateau des pêcheurs.

En regardant la barque 
et sa dissolution,
je songeais aux filets
qui avaient disparu.

Des toiles d'araignée,
filant entre les doigts,
aussi légers que forts
pour prendre les poissons.

Des anchois par centaines
et des sardines bleues.
Insaisissables proies
glissant entre les doigts.

La barque se mourait
dans un jardin côtier,
laissant au jardinier
sa mémoire de sel.

PORTIQUE

Je ne me suis laissé allé
qu'emporté par les paroles...

Je vous en prie vents et mers
tracez des spirales pour me rendre vôtre 
et montrez-moi toute l'errance du secret
du lyrisme d'une chaleur qui s'est distraite
dans le squelette sacré et la lourdeur menstruelle,
mot à mot, artistiquement assoupie.

Glòria Bassols i Compte, traduit du catalan
par Michel Bourret Guasteví 

vendredi 19 avril 2024

Et fondent les soucis

Le bois et la chaleur.
Entre deux portes sombres.
L'eau glacée, la vapeur
et les yeux qui se ferment.

Un moment d'absolu
et l'ombre passagère
d'un chevalier d'argent
venu de son Midi.

Petite demi-heure,
au cœur de la journée.
La conscience est entière
et fondent les soucis. 

Màgia negra

He deixat a la bústia
un sobre buit de mots.
Un plec prim perfumat
amb tarongina fresca.

Adreça d'aquarel·la
i segell de passió.
Una vela lleugera
per arribar al mar.

La bústia és desolada,
l'obliden els carters.
Mes el vent de l'abril
te la sabrà portar.

DEUX RIVIÈRES

Nos vies coulent comme deux rivières
audacieuses à l'heure de la crue
tandis qu'on les entend qui chantent doucement
sur le chemin sinueux vers un monde d'algues.

Je sens l'élan dans leur subtile connexion,
glissent mes désirs jusqu'aux vallées
et je me perds souvent pour ne pouvoir te rencontrer ;
il demeure prisonnier le bagage dans l'averse.

À la toute fin, la mer nous emportera
au dedans, au dedans avec la goélette de l'aube
et, alors, je voudrai encore, beau paresseux, t'aimer
avec l'immensité du sentiment qui nous sauve. 

Glòria Bassols i Compte, traduit du catalan
par Michel Bourret Guasteví 

NOUS NOUS EN IRIONS VERS LA MER

Nous nous en irions vers la mer
par le long chemin du désir,
cherchant les nectars marins
si toutefois la barque
n'était pas recouverte de terre.

Ce sont les fleurs, devant le monde,
de doux élans d'horizon,
des pétales, des zigzags vers le néant.
Et leur beauté encore
enflammera davantage le trouble.

Glòria Bassols i Compte, traduit du catalan
par Michel Bourret Guasteví 

Six heures cinq

À Glòria, Jordi et Lluís

Il est six heures cinq,
me voilà réveillé,
écrivant à la table
où m'attend le café.

À ma gauche un triangle
de livres nécessaires.
Le parfum de la mer,
les terres nostalgiques.

Des dédicaces tendres
et des pages cornées.
Le souvenir des vers
qui sont entrés en moi.



Pedretes a la boca

nissos blancs, petits... i dolços.
                            Jordi Tolosa

Pedretes a la boca,
pedretes de dolçor.
Cucurutxo marró
i tinta delicada.

Un acompanyament
digne d'un sibarita.
Llaminadura tendra
d'un títol regalat.

Pedretes a la boca,
com uns mot d'adroguer.
Paperines d'anissos,
espurnes de mirall.


Albère

La ligne de l'Albère,
son bleu dans le matin.
Le fil de fer rouillé
qui la déchire en deux.

L'empreinte de tes doigts
sur les clichés d'alors.
Le noir et blanc glacé 
et la chaleur des cœurs.

La haute tour griffée
d'une forêt d'antennes.
Le froid te saisissant,
avant midi le juste.












© Lionel Itié

jeudi 18 avril 2024

Dans la pénombre exquise

Le livre est si joli
et le temps m'est compté,
alors je le ravis
aux ombres de la nuit.

Dans la pénombre exquise,
des rêves éveillés,
je sentirai son âme
mon âme parfumer.

C'est un navire bleu,
avec quatre-vingts voiles,
un éventail de mots
pour chanter la mer claire.

La mer aventureuse
et celle qui se tait.
La mer tempétueuse
et celle des marais.



LES FRUITS ET LES JOURS

Dans les solides racines de ces terres,
survit le souvenir d'un temps passé.
Le bruit du vent tout autant que la clarté
intermittente des feuilles des arbres
chantent le temps et soupirent le souffle
des noms perdus dans les cendres fanées.
Et avec l'éternel automne du regret,
s'enflamment les semences des champs dorés,
qui, par contagion, donnent l'odeur de la terre humide
aux rêves fertiles des aïeux.
Prostrés de foi, nous baisons vos jours,
et nous levons, catégoriquement vaincus, les fruits
obstinés que nous avons hérités de la terre.

Lluís Bosch, traduit du catalan
par Michel Bourret Guasteví

RÉCIPIENTS

Silences muets dans des copeaux de plastique jaune
ongles noirs de travaux forcés
récipients transparents où la viande attend de pourrir
boyaux sanguinolents dans des seaux galvanisés
conteneurs mous
abattoirs de verres

Images fuyantes du passé.

Jordi Tolosa, traduit du catalan
par Michel Bourret Guasteví 

LA BAIE

La mer joue à échapper à ses voyages
et la plage devient une Walkyrie
sans lance, ni harnais, sereine.

L'arôme de la grève et la frise de la mer
incarnent toujours la plus païenne des danses.

Il n'y a pas de dédains, il n'y a pas de faiblesses,
il n'y a pas de limites, pas plus que de croyances.
C'est sur la rive que l'amour est possible,
l'ancrage d'une impatience joyeusement cyclique.
Elle va -attente insistante- et vient -rencontre persistante-,
Elle va et vient -comme le tic-tac- marquant la ténacité,
l'opiniâtreté rythmique, inépuisable de la vie.

Glòria Bassols i Compte, traduit du catalan
par Michel Bourret Guasteví 

L'été est là

Le mur est blanc et rêche.
La vue s'y perd et cède
à l'oreille la quête
de la durée sensuelle.

Bois de la contrebasse,
moiteur de la trompette,
carillon du piano.
Le temps s'étire et vole.

Ferme les yeux, ma douce.
Il n'est plus de présent,
il n'est que du présent.
Le temps s'est englué

dans la mélasse des sons.
Les vers claudiquent.
De quatre à six pieds,
peu importe. L'été est là.



Hacia el sur

Se fueron hacia el sur
en busca de belleza.
La mar los esperaba,
la mar con olas blancas.

Dejaron el Voló
y las blancas sábanas.
Se fueron hacia el sur.
Y allí se quedaron.

Me lo dijo un poeta,
de raíces malagueñas.
Me lo cantó un poeta
que allí los esperaba.

Nature morte bicolore

Le siège est rouge
et le fauteuil orange.
Le siège est un pétale,
le fauteuil alangui.

Une nature morte
où se suspend la vie,
les stylos sont d'acier
et l'encre y a tiédi.

Les douleurs s'y résolvent
puis l'on oublie le lieu,
mais pas ces deux couleurs
qui caressent la vue.














© Brigitte Prédeval

Mon arbre de l'amor

Estava l'amic tot sol, 
sots la ombra de un bell arbre.
                            Ramon Llull

Ha patit la sequera
sense dir-me mai res.
La seva fusta clara
s'ha tornat com d'or fosc.

I l'abril li ha fet néixer,
amb l'amor del seu nom,
unes fulles petites,
al cap de les branquetes.

Un arbre hermafrodita,
de l'amiga i l'amat
que em donarà ses flors
com un regal de núpcies.



Accueil

Le cœur a frissonné,
c'est l'heure de l'accueil.
Des paroles amies,
des paroles aimantes.

Six heures

Il est déjà six heures.
La noirceur se déchire,
s'ouvrant à la journée
et aux bruits du lever.

Le café qui bouillonne
dans un long sifflement.
Les tiroirs qui se ferment
et les volets qui s'ouvrent.

Le jour a commencé
dans le chant des oiseaux.
Il durera quinze heures
avant une autre nuit.

Un long instantané

Le chevalet est vide
qui accueillait la toile,
le lent ballet des yeux
et de la main qui peint.

Le tableau est parti.
Les cimaises l'attendent.
Un rectangle tout gris
qui se mourait d'ennui.

La toile est paysage
de la mer au matin.
Un long instantané
pour emplir les musées.

Le papier des paupières

Le papier des paupières
exige le sommeil,
la confiance des mains
qui s'étreignent en dormant.

Alors cesse le bruit
d'autres écrans trompeurs,
qui diluent la personne
dans leur anonymat.

Le papier des paupières
ne fait pas plus d'un pouce,
pour recevoir tout juste
les vers et les baisers.

Ritme lluminós

Una escletxa de llum
dins de la nit tancada.
La blancor d'una firma
en un paper mullat.

Sis batecs sense rima.
Un ritme lluminós.
Escletxes de fervor
que van de quatre en quatre 

mercredi 17 avril 2024

Tempus fugit

Le temps file si vite,
un chat et sa pelote.
Le temps file si vite,
il est déjà parti.

Étrange signature

La mer, la mer toujours recommencée.
                                        Paul Valéry

C'est la mer insituable,
c'est la mer insituée,
c'est le miroir de l'onde
sous le ciel de l'été.

La feuille a bu les eaux
que le sel suspendait.
Aquarelle des doigts
rêvant à l'horizon.

Un oiseau et son ombre
chinoise sur papier.
Étrange signature
déchirant sans blesser.











© Beni Ballesta

Étangs

Il est entre le ciel
et le limon des terres,
un espace ambigu
qui s'estompe au couchant.

On lui donne le nom
des étangs de naguère,
en confondant ensemble
ses milliers d'horizons.

Un camaïeu de bleus
avec des reflets bruns
et soudain ce trait mauve
qui annonce le soir.














© Beni Ballesta

Bienséance

Et j'ai pris l'habitude
de te parler le soir,
à l'heure des silences
et des sommeils profonds.

Je te savais dormant,
au creux de tes coussins,
offrant à la nuit noire
la pâleur de ta peau.

Je gardais la distance
qui sied au chevalier
ayant laissé l'armure
pour la blancheur du lin.

Sans cesser de penser

Te serrer dans ma voix,
te donner tout le grave
qui naît de ma poitrine
et que ma peau, sa sœur,
sait offrir à ta peau

T'étreindre dans mes mots,
dans le papier roulé
qui court entre mes doigts
et que mon cri, son frère,
sait offrir à ton cri.

Laisser entrer le blanc,
le silence absolu.
Puis cesser de t'écrire,
sans cesser de penser
à ta voix dans ma voix. 

Une plage en septembre

J'ai rêvé d'une plage
où je t'emmènerai,
pour marcher les pieds nus,
entre le sable et l'eau.

Une crique petite,
au pied des Pyrénées,
surmontée par des vignes
et une tour de guet.

Une plage en septembre,
à l'heure des écoles,
déserte de regards
et de pas dissonants.

Nous y regarderions
l'horizon se gonfler
de quelques voiles blanches
avançant lentement.

La mer aurait fraîchi
et nos mains s'étreindraient,
attendant de midi
la lumière insolente.

Unió

M'uniré amb la carn,
la carn dels mots salvatges,
mastegats lentament.

Plaisir serein

C'est un plaisir serein
que de naître à la nuit
et d'y voir voleter
des souvenirs aimés.

Tranchant sur la noirceur,
des tableaux inconnus,
qu'on découvrit la veille 
par le plus grand hasard.

Des marines côtières
ouvertes sur l'orient
ou des prés printaniers
regardant le couchant.

mardi 16 avril 2024

Pensant en el rostoll

La llum de les espigues
neix del pinzell voraç,
quan la foscor arriba,
desdibuixant el cel.

Són uns cabells de plata
sense rostre ni cap,
la llibertat del cant
a la fi del concert.

Ja penso en el rostoll
dels últims dies d'agost.
L'or batejant la terra,
embriagat de llum.














© Beni Ballesta

Ta peau

J'ai rêvé de ta peau,
en fermant les paupières.

Ce fut un songe bref
qui s'est inscrit en moi.

Depuis ce doux moment,
je caresse les pages

des livres de poèmes
sans les lire jamais.

Mes yeux se sont éteints
à l'encre de leurs larmes

et c'est ton rire franc
que je cherche en frôlant.

Ta peau m'ouvre à des mondes
que je pensais éteints

et c'est par la caresse
que j'y pénètre enfin.

Vent espiègle

J'ai laissé mon roman
sur la table de verre
et j'ai voulu t'écrire
sur le vent qui passait.

Des lambeaux de couleurs,
en guise de rideau.
La chaleur du printemps
et l'ombre des pavés.

Le vent est un coquin
qui s'enfuit quand j'y pense
et qui revient narquois
quand le sommeil me prend.



En un poble de mar

En un poble de mar,
les hores són d'onades,
de ventolí discret,
i de petjades vanes.

Si l'aire és de segons,
l'arena és de minuts.
El blau de l'aigua freda
vol el bes del cel clar.

En un poble de mar,
la pintora és batllessa
en un castell de sorra
que es fondrà al capvespre.














© Beni Ballesta

A taste of honey

Verde que te quiero verde.
Verde viento. Verdes ramas.
      Federico García Lorca

Has sembrat un miler
de pètals delicats
com un tast de mel roig
enmig de la pradera.

Roselles sense tiges
i colors sense pes.
El paisatge enquadra
un miratge sanguini.

Blancor de mil plomalls
que volen a l'entorn.
Qui sembra la blancura
és mestre del destí.

Del groc a la foscor,
el verd de la xarranca.
Saltem doncs a peu coix
per sortir del mirall.














© Beni Ballesta

Solitud

La llum. Només la llum.
La llum del cel i de l'onatge.
De la sorra molla i de la clara.

La llum de l'escuma fugissera,
que escapa al pinzell que cisella
una vista d'Empúries al matí.

Solitud. Solitud de sal i llum.
Ni un llaüt de vela blanca a l'horitzó,
ni cap empremta de passes enamorades,

a la vora del mar i d'esquena a l'Albera.
Natura viva i no pas morta. D'essència
pura. Més enllà de l'experiència d'un matí. 














© Beni Ballesta

El fill a la campana

En una sima fonda,
el fill fa de miner.
Ai, la mare asturiana!

Treballa a la campana
per extreure carbó.
Ai, la mare asturiana!

Els companys són de terra,
fan gresca i beuen vi.
Ai, la mare asturiana!

El pobre no té núvia,
tot i buscant sirena.
Ai, la mare asturiana!

Quan vol tornar a terra,
fa pudor de peix mort.
Ai, la mare asturiana!

Ja ha perdut son pare
ofegat per la mar.
Ai, la mare asturiana!

I sap que si vol viure,
se n'haurà de fugir.
Ai, la mare asturiana!